L’alimentation et le microbiote, aux origines de la dépression ?

Actualités Actualités patients

Rédigé par Estelle B. et publié le 29 mai 2022

Face à la dépression, les antidépresseurs ou la psychothérapie ne suffisent généralement pas. En effet, une approche globale s’avère souvent nécessaire. Parmi les mécanismes très étudiés ces dernières années, figure en tête l’axe intestin – cerveau, impliquant le microbiote intestinal. Une récente étude révèle un lien possible entre alimentation, microbiote et dépression. Explications.

dépression et alimentation

Dépression et microbiote intestinal

Est-ce que l’alimentation ou encore l’équilibre du microbiote intestinal peuvent influencer la dépression ? En effet, l’axe cerveau – intestin, largement étudié, pourrait expliquer certains liens entre des maladies psychiques et la santé intestinale.

Dans une récente étude, des chercheurs ont appliqué une approche associant des modèles précliniques avec le suivi de trois cohortes incluant des patients souffrant de dépression modérée. En analysant le microbiote des participants, les chercheurs ont mis en évidence des liens étroits entre dépression et composition du microbiote. En effet, les résultats font apparaître deux points fondamentaux :

  • 30 espèces bactériennes du microbiote étaient étroitement liées à la dépression ;
  • 327 fonctions bactériennes sur les plus de 5 000 identifiées, étaient significativement reliées aux troubles dépressifs.

La proline, acide aminé déterminant pour la dépression

La composition du microbiote intestinal des patients dépressifs n’apparaissait pas significativement différente selon les traitements antidépresseurs ou anxiolytiques prescrits. Pourtant, un grand nombre de médicaments modifient ou altèrent la composition du microbiote. Les fonctions bactériennes les plus liées à la dépression concernent principalement trois voies :

  • Le cycle de Krebs (fourniture d’énergie aux cellules) ;
  • Le métabolisme de l’histidine (un acide aminé) ;
  • Le métabolisme de deux autres acides aminés (proline et glutamate).

En analysant les acides aminés présents dans le tractus intestinal des patients dépressifs, les chercheurs ont mis en évidence que la proline était étroitement liée à la dépression. Les plus gros consommateurs d’aliments riches en proline n’étaient pas toujours les plus déprimés. Cependant, la présence de proline en forte concentration était associée à des modifications spécifiques du microbiote et par conséquent à la dépression.

Alimentation et microbiote, deux nouvelles cibles pour lutter contre la dépression

Chez la souris, la supplémentation en proline induisait des modifications du microbiote et augmentait les signes dépressifs. Des essais comparables chez les mouches ont confirmé le rôle central de la proline dans le lien entre santé intestinale et dépression. De telles données ouvrent la voie vers le développement de nouvelles voies thérapeutiques contre la dépression, en ciblant le métabolisme de la proline et le microbiote.

Cette nouvelle étude confirme l’importance de l’alimentation et de la santé intestinale dans la physiopathologie de la dépression. Faut-il alors supprimer ou réduire drastiquement tous les aliments riches en proline (viandes, œufs, lait, fromages, produits laitiers, …) ? Pas nécessairement, mais l’orientation vers des régimes plus riches en aliments d’origine végétale, comme le régime méditerranéen peut être une vraie bonne idée. Un régime qui a d’ailleurs fait l’objet d’une étude suggérant son intérêt pour réduire les symptômes dépressifs.

Estelle B., Docteur en Pharmacie

Sources
– Microbiota alterations in proline metabolism impact depression. cell.com. Consulté le 21 mai 2022.
– The effect of a Mediterranean diet on the symptoms of depression in young males (the “AMMEND” study): A Randomized Control Trial Get access Arrow. academic.oup.com. Consulté le 21 mai 2022.