Libérer les sensations pour éloigner la dépression

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Rédigé par Estelle B. et publié le 8 mai 2022

La réaction au stress peut-elle constituer une prédisposition aux troubles dépressifs majeurs ? Inhiber les symptômes de la dépression limite-t-il le risque de rechute après un épisode dépressif ? Deux chercheurs en psychologie ont lancé une grande étude basée sur l’imagerie cérébrale pour tenter de répondre à ces questions.

Femme ayant des symptômes de la dépression

Dépression et risque de rechute

La réaction neurologique face à un stress ou à une émotion négative pourrait déterminer le risque de dépression et de récidives des troubles anxiodépressifs. Disséquer cette réponse, grâce aux dernières technologies de l’imagerie médicale, pourrait accroître les connaissances sur la prédisposition à la dépression. Ainsi, cela fournirait des bases solides pour les stratégies de prévention primaire et secondaire.

Récemment, deux chercheurs canadiens en psychologie ont mené une grande étude prospective basée sur l’imagerie par résonance magnétique (IRM) cérébrale. Au total, l’étude inclut 85 patients sortants d’un épisode dépressif et à risque élevé de rechute. Les chercheurs les ont répartis aléatoirement en deux groupes :

  • Un groupe ayant suivi une thérapie cognitive de 8 semaines, axée sur le bien-être ;
  • Un groupe ayant suivi une thérapie de pleine conscience, sur une durée de 8 semaines.

Le suivi des patients s’étalait sur une période totale de deux ans, à raison d’une tous les deux mois. Le but était d’évaluer le risque de rechute.

Les régions cérébrales du contrôle des symptômes de la dépression s’éteignent

Les données d’imagerie mettent en évidence un lien entre un épisode passé de dépression et une plus forte tendance à bloquer les processus sensoriels en cas de stress émotionnel. Or, ce blocage pourrait être directement relié avec l’augmentation du risque de rechute de la dépression. Le cerveau du patient semble occulter les sensations physiques provoquées par le stress.

Lorsque les patients visionnaient des vidéos à fort contenu émotionnel, les régions cérébrales impliquées dans le contrôle des sensations semblaient éteintes. Cette tendance à l’inactivité de ces zones était d’autant plus forte chez les patients ayant rechuté. Ces résultats sont comparés à ceux des patients n’ayant pas rechuté. A l’inverse, les patients qui décrivaient de fortes sensations de tristesse en visionnant les vidéos n’étaient pas les plus touchés par la rechute des troubles dépressifs.

Laisser venir et apprivoiser ses sensations

Pour les auteurs de l’étude, l’extinction des régions cérébrales impliquées dans le contrôle des sensations provoque une sorte de découplage entre ce que ressent le patient et ce qu’il est en train de vivre. Une situation qui pourrait être propice aux troubles dépressifs. Ils marqueraient un désintéressement des activités quotidiennes ou des situations vécues. Ainsi, le patient reste dans une espèce de bulle. Il peut y laisser se développer les images négatives de sa dépression.

De tels résultats pourraient expliquer la survenue d’une partie des rechutes de la dépression. Pour lutter contre ce phénomène, il apparaît essentiel d’aider les patients à ressentir les émotions et à percevoir les sensations associées aux événements positifs comme négatifs. Avoir pleinement conscience de l’impact que chaque situation provoque sur le plan physique (des larmes, de la peur, de la tristesse, …) constitue une base de travail solide pour écarter autant que possible les pensées dépressives et ainsi éloigner le risque de rechute.

Estelle B., Docteur en Pharmacie

Sources
– Feeling sensations, including ones connected to sadness, may be key to depression recovery. medicalxpress.com. April 20, 2022.
– Static and treatment-responsive brain biomarkers of depression relapse vulnerability following prophylactic psychotherapy: Evidence from a randomized control trial. Norman A.S. Farb and al. 2022. NeuroImage: Clinical 34 : 102969. sciencedirect.com